dimanche 24 mars 2013

Kawah Ijen, sur la voie des porteurs de soufre


Après un bon dîner englouti dans un vrai restaurant cette fois-ci, notre première nuit dans notre hôtel de Bondowoso fût bonne mais courte. Nous avions réservé dès notre arrivée auprès de la réception un 4x4 avec chauffeur pour nous rendre à Kawah Ijen y admirer son spectaculaire lac de cratère, son épaisse forêt, ses plantations de cafés mais aussi et avant tout, le courage et le respect des porteurs de soufre.

Voilà le pourquoi de notre venue dans la ville de Bondowoso, qui est l’une des seules portes d’accès au parc. L’état des routes pour atteindre la base du volcan explique le faible nombre de touristes dans la région. Le moyen le plus simple et le plus sûr, sachant qu’il faut partir de nuit pour arriver là-bas au lever du soleil lorsque les ramasseurs travaillent, est de louer un véhicule.

Levés à 3h30, nous avons rejoins notre chauffeur qui nous attendait devant l’hôtel. Après un bon café Javanais, c’était parti pour 2h de trajet sur une route cahoteuse et montante, au travers de petits villages et de forêts denses. Notre hôtel nous avait préparé un p’tit déj à emporter, sympa ! Mais pas très pratique d’étaler son beurre sur une tartine dans un 4x4 la nuit…

Arrivés à 6h15 sur place, nous avons entamé l’ascension de 3kms vers le sommet pour atteindre le somptueux lac de soufre turquoise à 2 148m d’altitude, entouré des parois abruptes du cratère. La montée fût difficile mais quand on sait que c’est le chemin empreinté 2 fois par jour par les porteurs de soufre avec des charges énormes sur leurs dos, nous avons rapidement oublié notre douleur.

D’ailleurs, en chemin, un jeune porteur de 23 ans nous a dépassé avec son panier vide en direction du cratère afin de le re-remplir pour la seconde fois de la matinée et de redescendre le volcan avec une charge de 80kg ! Pour nous humilier un peu plus, il fumait, parlait et riait ! Nous le regardions avec notre langue au sol tentant difficilement de reprendre notre souffle.


Durant l’ascension, nous avons croisé l’un des managers du site, qui s'occupe de vérifier les quantités de soufre amassées. Nous avons papoté quelques minutes et il nous a expliqué en détail la tâche quotidienne des 300 porteurs du site. Ils se lèvent à 3h du matin pour bosser 6h, le temps nécessaire d’effectuer 2 aller-retour de la base au centre du vocan, ils portent entre 50kg et 110kg selon les gabarits et ne gagnent que 600 rupiahs par kilo de soufre soit environ 0,05 euros… Une misère ! Où trouvent-ils leur motivation ?! Un porteur plus âgé a répondu à cette question en nous disant qu’il se levait tous les matins en pensant à ses 2 enfants à nourrir et qu’il ne voudrait pour rien au monde qu’ils fassent la même chose plus tard. Et nous qui nous plaignons toujours pour rien, parce que notre chef nous a demandé de finir 15 min plus tard ou d’arriver plus tôt, quelle honte !

 
Au 2ème kilomètre, une cabane en bois permet à ces hommes de récupérer quelques minutes et d’y déposer leur première charge. Chacun sa technique, certains font 2 aller-retour directement, d’autres déposent leur première charge à la cabane pour aller chercher directement la seconde. A cet endroit, nous avons fait la connaissance d’un vieux porteur aujourd’hui superviseur, qui a eu la chance de travailler au côté de Nicolas Hulot ! Il nous a expliqué que Mr Hulot est venu ici en 97 pour y tourner une des émission d'Ushuaïa Nature. Cet ancien porteur a accompagné l’équipe Ushuaïa pour leurs expliquer le processus de prélèvement, la vie des porteurs,… Il m’a d’ailleurs proposé de porter un panier de 70kg de souffre pour montrer ce qu'ils endurent, je peux vous garantir que je ne serais pas allé bien loin avec sa sur le dos ! La barre séparant les 2 paniers est faite en bambou. Flexible mais très solide, le bambou oscille de bas en haut à chaque pas ajoutant un poids supplémentaire dût aux paniers chargés situés aux extrémités.


Au sommet, nous avions une vue globale du cratère avec le lac turquoise en contre-bas. Une épaisse fumée blanche provenant de l’extraction de souffre empêchait une bonne visibilité. Les guides nous ont recommandé de ne pas y descendre à cause du chemin (un français y a trouvé la mort en glissant) et de la fumée toxique émanant du volcan. Mais nous n’avions pas fait toute cette route juste pour prendre une photo depuis le sommet et des paysages alentours. Nous voulions avant tout voir dans quelles conditions bossaient ces hommes et la difficulté du chemin qu’ils empreintaient pour sortir du volcan. C’est pourquoi nous avons pris le risque d’y descendre. 


En chemin, nous avons croisé la route des porteurs qui remontaient machinalement, avec la grimace au visage montrant la douleur qu’ils enduraient… La plupart sont équipés de tongs ou de chaussures usées jusqu’à la semelle !! J’avais honte d’avoir mes belles baskets Adidas à 130€… Et malgré ça, nous avions du mal à tenir debout parmi tous ces rochers. Nous étions gênés de croiser leurs regards. Nous, touristes, qui descendions par curiosité voir ces pauvres hommes travaillaient en leurs faisant un sourire comme si ça aller changer leur vie ! Nous les dérangions plutôt qu’autre chose.


Plus nous descendions et plus il était difficile de respirer. Nous toussions sans arrêt dû à la fumée. Nous nous y sommes attardés que quelques minutes afin de voir comment les porteurs extrayaient cette substance jaune du volcan. Tout simplement avec une espèce de pioche et leurs mains ! Une fois les paniers remplient, ils entament la dure remontée jusqu’au sommet.


Sur le chemin du retour, nous avons croisé un porteur qui descendait avec ses 80kg sur les épaules. Je lui ai demandé si je pouvais l’aider en portant son fardeau. 50m plus loin, je n’en pouvais plus !! Ce n’est pas temps le poids qui m’a arrê mais plutôt la douleur sur mes épaules et ma colonne vertébrale. Nous comprenions mieux la bosse qu’ils avaient tous au niveau des trapèzes. Je me suis excusé de ne pouvoir l’aider davantage…


La route du retour vers notre hôtel fût silencieuse. Les images et le courage des porteurs de soufre travaillaient notre esprit.


2 commentaires:

momo a dit…

les pauvres !!!!!!ils doivent ere uses !!!le dos l odeur du soufre !!!!!bises

Isabelle a dit…

quel courage et quelle claque pour nous ! total respect pour ces êtres qui en plus gagnent une misère ! et tout ça avec le sourire ! Je comprends votre silence au retour ! Belle leçon pour les nantis que nous sommes ! Gros bisous et bonne continuation